11 avril 1871 : l'Union des femmes pour la défense de Paris et les soins à donner aux blessés
Document : convocation de la troisième réunion publique du Comité central provisoire de l'Union des femmes pour la défense de Paris et les soins à donner aux blessés
Date : 21 avril 1871
Fonds : documents figurés
Cote : Atlas 529
Le 10 avril 1871, la Commune vote un décret pour l’indemnisation des gardes nationaux tués ou blessés au combat. En cas de décès d’un garde national, le texte prévoit le versement d’une pension de 600 francs à sa femme, qu’ils aient été mariés ou non, et d’une pension de 365 francs à ses enfants, reconnus ou non. Une aide supplémentaire pourra également être allouée aux ascendants ainsi qu’à la fratrie du défunt, dans le cas où ce dernier était soutien de famille. Une commission d’enquête doit déterminer, dans chaque arrondissement, du bon droit des bénéficiaires.
Dans un état nominatif des secourus pour le mois d'avril 1871, conservé aux Archives de Paris dans le fonds de l'administration communale, le numéro d'ordre 22 mentionne l'allocation de 50 francs à une dénommée Léonie Dubois, femme (non mariée) d'Alexandre Hinder, garde nationale blessé à Asnières le 20 avril et mort à l'ambulance de la prison de Clichy le même jour. Une pension annuelle et viagère est allouée à leur fils naturel, Alexandre Léon Dubois, âgé de deux mois.
Il s’agit là d’une avancée sociale importante qui tient compte de la réalité sociologique des classes populaires parisiennes. Elle est rendue possible grâce à l’implication des femmes dans la politique de la Commune.
La Commune de Paris constitue en effet un jalon dans l’histoire de la lutte pour l’égalité entre hommes et femmes en France. Les femmes participent aux premières manifestations contre le gouvernement de la Défense nationale et jouent un rôle prépondérant dans la journée du 18 mars 1871. Aux côtés des plus célèbres comme Louise Michel, André Léo ou Marie Laverdure, un grand nombre d’anonymes s’engagent. Principalement issues de la classe ouvrière, les Communardes sont de toutes origines, conditions et âges. Elles revendiquent l’égalité des droits, et plus particulièrement civiques, l’égalité des traitements et des salaires, une instruction laïque et gratuite pour les filles comme pour les garçons, une participation pleine et entière à la chose politique et aux combats pour la défense de la Commune, l’autorisation du divorce, la fermeture des maisons de tolérances… Elles fréquentent les clubs politiques où se débattent les réformes. Leur action est particulièrement significative en matière d’éducation et de culture. Au sein d’une Commune encore largement sous l’influence des théories sexistes de Proudhon, les Communardes ouvrent une brèche.
Le 11 avril 1871, Élisabeth Dimitrieff et Nathalie Le Mel, membres de l’Association internationale des travailleurs, fondent l’Union des femmes pour la défense de Paris et les soins à donner aux blessés. Ses statuts sont publiés dans l’édition du soir du 20 avril du journal « La Sociale ». L’union des femmes est organisée en comités de onze membres qui siègent en permanence et tiennent séance chaque jour. Un comité central, composé de déléguées des comités d’arrondissement, sert d’intermédiaire avec les commissions gouvernementales. Après la décision de réquisitionner les ateliers parisiens abandonnés, l’Union des femmes est notamment chargée de la réorganisation des ateliers coopératifs et du travail des ouvrières. Mais l’une de ses principales revendications est la participation pleine et entière aux combats, « soit aux ambulances ou aux fourneaux, soit aux barricades ». Nombreuses sont celles qui combattent jusqu’aux dernières heures de la Semaine sanglante et sont prises les armes à la main, exécutées sur place ou condamnées à la réclusion ou à la déportation.
Dans une lettre conservée aux Archives de Paris dans le fonds de l’administration communale, les membres du comité de l’Union des travailleuses du 13e arrondissement s’adressent à Léo Frankel, délégué au travail, à l’industrie et à l’échange, pour lui demander son arbitrage dans un différend qui les oppose à la mairie du 13e. Elles réclament une plus grande participation dans la gestion des affaires de l’arrondissement, ce qui leur est refusé. Le ton de cette pétition reflète parfaitement la fermeté des convictions des Communardes ainsi que leur détermination à participer à part égale à la révolution communale.