8 février : élections et levée progressive du rationnement

Carte d’électeur de Charles Milon, délivrée le 4 février 1871 par la mairie du 14e arrondissement. Archives de Paris, VD3 18.

Document : carte d’électeur de Charles Milon, délivrée par la mairie du 14e arrondissement
Date : 4 février 1871
Fonds : administration de la Commune de 1871
Cote : VD3 18

Le 8 février, les Français se rendent aux urnes pour élire une Assemblée nationale chargée de négocier les termes de la paix avec le nouvel Empire allemand. Les Archives de Paris conservent par ailleurs quelques traces de la tenue de ces élections, comme cette carte d’électeur délivrée par la mairie du 14e arrondissement le 4 février 1871. Sur les 768 sièges, seuls 675 sont pourvus, certaines personnalités comme Adolphe Thiers ou Léon Gambetta étant élues dans plusieurs départements. Les régions françaises, à l’exception de l’Est occupé par les armées ennemies, placent au pouvoir une majorité de monarchistes et de bonapartistes défavorables à Paris, partisans d’une paix rapide qui permettra le prompt retour des prisonniers et des soldats dans leurs foyers. Les Parisiens, eux, élisent 36 républicains opposés à la capitulation, sur 43 députés. La fracture entre la province et la capitale est entamée. Le but de l’Assemblée nationale sera, aussi, de soumettre Paris.

Car après l’annonce de la capitulation, fort mal perçue par une large partie de la population parisienne, la colère gronde et le gouvernement de la Défense nationale s’emploie à maintenir l’ordre en levant les mesures les plus contraignantes liées au siège. Le 7 février 1871, un décret met fin aux réquisitions et suspend le rationnement de la viande. Le lendemain, c’est le pain qui n’est plus rationné. Pour autant, si Paris n’est plus assiégée, elle est toutefois encore encerclée, et les difficultés persistent. Elles apparaissent en creux dans ce témoignage sur le fonctionnement des services publics ordinaires et extraordinaires pendant la guerre, malgré la volonté affichée de l’auteur de démontrer un retour rapide à l’ordre, par opposition à ce qu’il décrit comme « l’occupation illégale des mairies pendant plus de deux mois, à compter de mars 1871 [et qui] y jeta une perturbation absolue ». Rédigé par un collaborateur de Lazare Carnot, maire du 8e arrondissement, ce texte est conservé aux Archives de Paris dans le fonds des mairies d’arrondissements.

On peut ainsi lire, dans le « Chapitre 1er – Administration municipale s’appliquant aux services exceptionnels résultant de la guerre et de l’investissement » sur la mise en place du rationnement, de sa gestion, puis de sa levée : « En ce temps si exceptionnel, aucun acte d’administration n’était simple. Il fallait diviser la distribution, en faire connaître à l’avance les éléments, en déterminer les prix, éviter les obus... [...] Enfin il fallut à la fin du mois de janvier 1871 reconnaître que tous les aliments possibles étant épuisés, la position n’était plus tenable.

Il devait se passer encore un certain temps avant que les choses reprissent un cours normal – on ne ravitaille pas en quelques heures, ni même en quelques jours une ville comme Paris et on ne rétablit ni facilement ni promptement tous les rouages d’une aussi vaste administration. Cependant dans le courant du mois de février, la réorganisation était sinon parfaite, au moins assez avancée pour qu’on mit fin aux mesures exceptionnelles.

L’organisation spéciale des boucheries qui avait été une nécessité pendant le Siège, n’était plus en harmonie avec le retour aux conditions ordinaires d’approvisionnement. D'eux-mêmes, l'un après l'autre, les arrondissements cessèrent de prendre livraison de la viande de boucherie que le ministère du Commerce mettait à leur disposition. Le public renonçait aux habitudes qu’il avait dû prendre pendant le Siège – il s’alimentait directement... »

Mairie du 8e arrondissement : historique du fonctionnement des services publiques ordinaires et extraordinaires pendant la guerre franco-prussienne (1870-1871), 1874. Archives de Paris, VD6 1586.