Décembre 1870 : grande boucherie canine et féline
Document : « Grande boucherie canine et féline », réponse d’Henri Carteret à la Gazette des tribunaux
Date : 9 décembre 1870
Fonds : fonds privés départementaux, collection Saffroy
Cote : D30Z 1
En décembre 1870 s’installe sur la capitale un hiver particulièrement rigoureux. La viande, déjà rationnée depuis le mois d’octobre, manque désormais totalement. Cette pénurie ne touche bien sûr pas toutes les classes de la population. Les plus riches trouvent encore, même en janvier 1871, de quoi se fournir au marché noir, notamment grâce aux animaux du Jardin d’Acclimatation (et non du Jardin des Plantes comme l’on a pu le lire). Les Parisien.ne.s les moins fortuné.e.s, c’est-à-dire une vaste majorité de la population, se nourrissent de ce qu’ils peuvent trouver. C’est le temps du civet de rat et des boucheries canines et félines. Ces récits renvoient aujourd’hui à l’imaginaire de la disette pendant le siège. Pourtant, au-delà de leur caractère anecdotique, ils apportent un éclairage essentiel sur la colère des Parisien.ne.s à l’annonce de la capitulation française et sur la volonté de certain.e.s de ne pas baisser les armes ; cette capitulation qui invalide les privations et les souffrances des habitants les plus humbles de la capitale, les renvoyant à l’état de simples anecdotes de l’Histoire.
Les Archives de Paris conservent dans les fonds d’origine privée un document qui permet de saisir la montée des dissensions au sein de la population parisienne, cristallisée par les nouvelles contraintes alimentaires. Si les plus pauvres ne parviennent plus, depuis longtemps déjà, à mettre de la viande dans leur assiette, certains peuvent espérer manger du chien ou du chat. En ce début décembre 1870, les plus riches considèrent encore avec dédain la consommation de ces animaux de compagnie. Objet de raillerie dans les journaux à cause de la provenance de sa marchandise, le boucher Henri Carteret se défend et répond, avec fierté et audace. La teneur de son récit, que précède la mention « Résistance à outrance », et ses tournures ironiques, montrent une autre physionomie de la lutte des classes.